lundi 15 avril 2013

L'arnaque des méta-analyses

Actuellement, il y a une sorte de "consensus" qui place les méta-analyses au sommet de l'Evidence-based Medicine. Mais je ne suis pas d'accord. Pourquoi ?

"Arnaqu"e.
C'est un mot un peu fort pour une méthode statistique bien connue et tout à fait valable.
En réalité, certaines méta-analyses peuvent être intéressantes, quand elles sont bien faites.

Le professeur Michel CUCHERAT explique bien ce qu'est une méta-analyse, sur son site d'accès gratuit. Cette technique nécessite une hypothèse fondamentale et doit suivre des règles précises.

La plupart des méta-analyses dont nous inondent les scientifiques, travaillant avec les labos Pharma, sur le sujet des statines ne suivent pas ces règles là.

De plus, même si les méta-analyses étaient rigoureuses et honnêtes, elles auraient encore quelques défauts. Voir le Power Point proposé par Michel Cucherat : diapositives 17 à 20.

Les études proposées par l'industrie Pharma sont fortement biaisées en faveur de leur produit commercial. Ce n'est pas une supposition mais une observation prouvée et mesurée, chiffrée dans différentes études (voir Sources à la fin de l'article).

Nous nous retrouvons donc avec un déferlement d'études inutiles et encombrantes, sponsorisées par l'industrie Pharma. Et cet afflux d'études en faveur des statines noie les quelques études, indépendantes et fiables, qui essaient de faire de la science correctement.

Cela permet à des leader d'opinion d'expliquer au lecteur qu'il DOIT continuer son traitement "statines" car "il y a tellement d'études que c'est incontestable".

On lit aussi qu'analyser les données de la science relève du révisionnisme, de la théorie du complot ou du négationnisme. Ces éléments de langage se retrouvent dans des articles divers ou dans certains discours des "leader d'opinion" qui collaborent avec l'industrie Pharma, comme s’ils étaient coordonnés par une agence de publicité.


 

Revenons maintenant aux méta-analyses, après avoir fait un petit tour dans les éléments de langage, visant à discréditer ceux qui prennent la parole sur ce sujet, comme si vouloir analyser des données de santé publique étaient un grave délit.

Plusieurs essais cliniques, fondus en un seul, sont en théorie plus puissants (nombre de patients plus important) qu’un seul essai ou deux essais analysés séparément.
En réalité, avec la méta-analyse on se prive de trois des aspects techniques qui font la force et la sécurité de l’essai clinique :
– le tirage au sort,
– le double aveugle,
– l’énoncé d’une hypothèse a priori, avec calcul de la taille de l’échantillon et de la durée de suivi nécessaire. 

Les données utilisées dans les méta-analyses sont extraites d’essais cliniques déjà terminés. On a alors des sous-groupes de patients (ne résultant ni d’un tirage au sort, ni d’une hypothèse a priori).

Ces faiblesses des données agrégées sont à l’origine de nombreux biais dans les méta-analyses

Pour illustrer cette question, deux exemples de méta-analyses biaisées méritent d’être cités.  
Selon les "experts" de la théorie du cholestérol, plus le risque est élevé et plus le bénéfice attendu de la réduction du cholestérol est important. Dans les essais analysés (portant sur l'insuffisance cardiaque et l’insuffisance rénale), le risque de complications cardiovasculaires était élevé, comme dans le diabète. Selon les "experts", les statines ne pouvaient donc avoir que des effets bénéfiques chez des patients à risque élevé

Des méta-analyses ( méta-analyse Cochrane sur l'insuffisance rénale et méta-analyse sur l'insuffisance cardiaque) semblaient avoir confirmé cette efficacité.
Mais lorsque les statines ont été testées par des essais cliniques dans lesquels le tirage au sort était réalisé sur des populations d’insuffisants cardiaques (1,2) ou rénaux (3,4) exclusivement, les statines se sont avérées totalement inefficaces.

La leçon a tirer de cet exemple est qu'une méta-analyse ne remplace pas un essai clinique bien fait. Affirmer que c'est le "plus haut niveau de preuve" est faux et dangereux.



Sources : 


Merci au cardiologue Michel de LORGERIL et à certaines explications sur les méta-analyses, tirées d'un long article de son blog



1- Kjekshus J, Apetrei E, Barrios V, et al. Rosuvastatin in older patients with systolic heart failure. N Engl J Med 2007;357:2248-61.

2- Gissi-HF Investigators, Tavazzi L, Maggioni AP, Marchioli R, et al. Effect of rosuvastatin in patients with chronic heart failure (the GISSI-HF trial): a randomized, double-blind, placebo-controlled trial. Lancet 2008;372:1231-9.

3- Fellström BC, Jardine AG, Schmieder ME, et al for the AURORA study group. Rosuvastatin and cardiovascular events in patients undergoing hemodialysis. N Engl J Med 2009;360:1395-407.

4- Wanner C, Krane V, März W, et al. Atorvastatin in patients with type 2 diabetes mellitus undergoing hemodialysis. N Engl J Med 2005;353:238-48.


Publication of Clinical Trials Supporting Successful New Drug Applications: A Literature Analysis

Factors Associated with Findings of Published Trials of Drug–Drug Comparisons: Why Some Statins Appear More Efficacious than Others

Undue industry influences that distort healthcare research, strategy, expenditure and practice: a review

Voir aussi mon article sur un organisme "universitaire" dont le rôle est de produire des méta-analyses favorables à l'industrie des statines

Voir aussi la façon dont les essais cliniques dissimulent les effets secondaires et augmentent le bénéfice apparent du médicament testé.

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